CIRCUIT DE LOGIQUE SÉQUENTIELLE

Les feux de circulation sont un exemple bien connu de circuit de logique séquentielle. Pour analyser un tel circuit, il est nécessaire d’adopter une approche méthodique et structurée. La description par grafcet se révèle l’outil par excellence pour cette analyse.

Description du grafcet

Le grafcet est un diagramme ou schéma fonctionnel, c’est-à-dire une représentation graphique des étapes et des transitions d’un circuit de logique séquentielle. Il est normalisé et donc reconnu par plusieurs organismes internationaux. La résolution par grafcet du fonctionnement séquentiel d’un circuit ou d’un automatisme est systématique et concise et, de ce fait, elle a une longueur d’avance sur ses rivales.

Un projet d’automatisation requiert la collaboration de divers spécialistes du milieu industriel. Chaque spécialiste intervient dans le processus avec son propre langage (informatique, contrôle des procédés, entretien, etc.). Comme élément de communication entre ces intervenants, le grafcet devient le point de départ du développement de tout projet d’automatisation. En effet, cet outil de représentation graphique accompagne le système automatisé, de sa conception à son exploitation. Ainsi, le personnel de production ou d’entretien peut aussi participer à l’élaboration des séquences d’un système automatisé, car le grafcet décrit le projet d’une manière graphique sans exiger une connaissance approfondie des technologies utilisées.

Synthèse d’un automatisme

En vue d’accroître la productivité et la compétitivité d’une entreprise, il devient nécessaire d’analyser l’ensemble de la production industrielle afin d’améliorer les trois volets suivants :

  • conception des produits;
  • processus de fabrication;
  • automatisation de l’équipement.

Ces trois domaines sont constamment reliés. Cette interaction conduit les entreprises à ne plus considérer l’automatisation comme un but, mais comme un moyen en vue d’obtenir une productivité accrue. Dès lors, il faut établir un cahier des charges en ayant comme objectifs :

  • une évaluation juste et réaliste des besoins;
  • la rentabilisation des coûts d’amélioration (amortissement) sur une courte période ;
  • la maîtrise du nouvel équipement lors de la mise en route.

Pour favoriser l’atteinte de ces objectifs, il existe des «outils-méthodes » qui facilitent la communication technique et la conception du processus automatisé. C’est le rôle du grafcet.

D’abord, sachez que la synthèse d’un automatisme séquentiel (séquenceur) consiste à établir des relations entre les informations d’entrée et les dispositifs de sortie, à travers une unité de commande.

Ces relations se décomposent généralement en étapes ou en séquences selon un ordre chronologique déterminé par les spécifications fonctionnelles (description du cycle, marche de l’automatisme...). Des considérations technologiques (choix du matériel, choix des sources d’énergie, contraintes environnementales...) et opérationnelles (cadence, fiabilité, maintenance, sécurité...) influencent aussi la réalisation d’un automatisme.

Caractéristiques graphiques du Grafcet

Un circuit de logique séquentielle, appelé aussi séquenceur, effectue un parcours préétabli. En partant d’un état donné, il réalise différentes actions et revient à l’état de départ. Tout ce qui se passe entre les deux états de départ s’appelle cycle. De plus, l’état de départ constitue l’état initial. Considérez l’exemple d’une machine à percer dont le schéma de fonctionnement apparaît à la figure de la page suivante.

Le cycle de fonctionnement de cette perceuse se compose d’une attente de l’ordre de marche à l’état initial, d’une descente jusqu’à la position basse et d’une remontée jusqu’à la position haute. À partir de cet exemple, on peut détailler les éléments qui composent le graphique.

L’étape initiale est représentée par une boîte à double carré qui indique le début de la séquence. Elle évoque une situation particulière imposée par les conditions de départ du cycle.

L’étape détermine les actions réalisées à un instant donné. Elle est représentée par une boîte contenant un numéro. On indique les actions associées à une étape à l’intérieur d’un rectangle rattaché à la boîte par un tiret à la droite du symbole de l’étape. À un instant donné du fonctionnement du séquenceur, une étape est soit active, soit inactive. On peut indiquer les étapes actives à un instant bien précis en plaçant un point sous le numéro de l’étape. Ainsi, la séquence de la figure précédente contient deux étapes qui exécutent une action ou un ordre, soit une étape pour la descente et une autre pour la montée de la perceuse.

La transition constitue le lien entre deux étapes. Elle détermine le passage de la fin d’une étape au début d’une autre. Une transition est franchie à certaines conditions. Ces conditions se nomment réceptivité. La réceptivité d’une transition s’écrit sous la forme d’une proposition logique (fonction combinatoire) et représente l’événement attendu (condition) pour effectuer cette transition. Les variables d’entrée de cette fonction peuvent provenir des entrées et des sorties du système de commande, de variables auxiliaires ou de l’état des autres étapes. On symbolise une transition par un trait perpendiculaire à la liaison qui joint deux étapes

Les liaisons orientées relient les étapes entre elles. Elles indiquent les voies d’évolution du grafcet. On symbolise les liaisons orientées par des lignes verticales ou horizontales. Par convention, l’évolution s’effectue toujours du haut vers le bas. On ajoute une pointe de flèche seulement lorsqu’on ne respecte pas cette convention.

En somme, un grafcet représente une succession alternée d’étapes et de transitions. À chaque étape, on associe les actions à réaliser. À chaque transition, on associe la condition logique permettant de valider la réceptivité. Bien que la façon de représenter le grafcet puisse différer d’un ouvrage ou d’un logiciel à l’autre, la base demeure la même.

Niveaux de grafcet

Lorsqu’on veut décrire un système séquentiel, il est nécessaire de définir les actions que l’automatisme doit exécuter selon la situation. Il existe deux niveaux de grafcet, désignés I et II, pour décrire un séquenceur.

Selon le grafcet de niveau I, les différentes fonctions et commandes engagées dans le processus sont définies sans préjuger de la technologie qui sera utilisée (capteurs, dispositifs de sortie et partie commande). Le grafcet de niveau I décrit des actions et des événements sous forme de texte, à l’aide de termes généraux.

Quant au grafcet de niveau II, il précise la nature exacte et la technologie des capteurs et des dispositifs de sortie, ainsi que leurs caractéristiques. Il tient donc compte des spécifications matérielles ainsi que du contexte d’exploitation (source d’énergie, température, humidité, etc.). À ce niveau, tout est pris en considération : le choix des composants, le bon maintien et la fiabilité du système, l’élimination des pannes dangereuses, l’établissement des modes de marche et d’arrêt, ou toute autre spécification opérationnelle. Le grafcet de niveau II est caractérisé par sa forme codifiée (abréviations et symboles).

En réalité, le grafcet de niveau I est une ébauche du fonctionnement de l’automatisme exprimé en langage courant et compréhensible par tous les intervenants. Une fois que le cycle se précise, qu’on a considéré les procédures de fonctionnement en cas de défaillance et qu’on a choisi le pupitre de commandes (boutons-poussoirs, sélecteurs, voyants de référence, etc.), on est en mesure d’adapter et de transformer la séquence pour obtenir un grafcet de niveau II complet. La séquence d’un grafcet de niveau II est sécuritaire et prévoit toutes les situations possibles.

Table des entrées et sorties

Comme la description du grafcet de niveau II comporte une écriture symbolique, il est souvent nécessaire d’y joindre une table de correspondance des symboles. Cette table contient aussi des informations pertinentes sur les caractéristiques et la fonction des composants.

Afin de repérer facilement les composants d’entrée et de sortie, il est préférable de respecter les normes suivantes lors de l’utilisation des symboles :

  • lettres minuscules pour les symboles des entrées(arrêt, plein, temp_bas, etc.);
  • lettres majuscules pour les symboles des sorties (MOTEUR, POMPE, DÉFAUT, etc.).

Règles d’évolution du grafcet

On peut décrire un séquenceur comme un ensemble d’événements. Chaque événement commence par un événement et se termine par un autre, de sorte qu’un enchaînement d’événements produit la séquence désirée. Il y a toutefois quelques règles à respecter pour traduire une séquence sous la forme d’un grafcet.

Règle 1 : Situation initiale

La situation initiale d’un grafcet caractérise le comportement initial de l’automatisme et correspond aux étapes actives au début du fonctionnement. Elle traduit généralement un comportement de repos, car l’automatisme est en attente d’informations.

Règle 2 : Franchissement d’une transition

Pour qu’un grafcet évolue d’une étape à une autre, il faut franchir une transition. Pour que cette transition soit franchissable, il faut :

  • que l’étape qui précède immédiatement la transition soit active. On dit alors que la transition est validée ;
  • que la réceptivité associée à la transition soit vraie (équation logique = 1).

Lorsque ces deux conditions sont simultanément présentes, la transition est franchie.

Sur la figure suivante, le point indique que l’étape 4 du grafcet est active. Seule la transition ayant la réceptivité a1 est validée. La séquence évoluera de l’étape 4 à l’étape 5 seulement lorsque la réceptivité a1 deviendra vraie. Cet exemple distingue clairement les systèmes séquentiels des systèmes combinatoires. Les changements d’état des capteurs « rotation », « court » et « long » n’ont aucun effet sur l’évolution de la séquence de l’étape 4 à l’étape 5. Une seule transition est validée et toutes les autres sont ignorées.

Règle 3 : Évolution des étapes actives

Le franchissement d’une transition entraîne simultanément l’activation de l’étape suivante et la désactivation de l’étape précédente. Sur la séquence de la figure précédente, la réceptivité a1 = vraie entraîne l’activation de l’étape 5 et la désactivation de l’étape 4. En somme, pour une suite linéaire d’étapes, une seule étape peut être active à la fois.

Implantation d’un grafcet linéaire

Certains systèmes industriels exécutent toujours la même suite d’actions. On dit alors qu’ils possèdent une séquence unique, car les étapes du grafcet s’ordonnent selon une seule suite linéaire.

La phase d’implantation d’un grafcet consiste à réaliser les circuits de l’automatisme à l’aide des composants de la technologie choisie. Peu importe qu’on utilise une commande pneumatique, électrique ou électronique, il est préférable de décortiquer la séquence en petites parties autonomes et de traiter chacune d’elles de façon individuelle. En général, on peut diviser un grafcet en trois parties distinctes :

  • le traitement préliminaire, qui concerne les modes de marche et d’arrêt d’un séquenceur;
  • le traitement séquentiel, qui correspond à l’évolution des étapes;
  • le traitement postérieur, qui s’applique aux signaux de commande envoyés aux dispositifs de sortie.

Toutefois, il faut garder à l’esprit que chaque partie s’intègre dans un tout et que ces parties s’influencent entre elles. Prenez l’exemple de deux vérins pneumatiques en position sortie, l’un à rappel-ressort et l’autre, à double effet. Si l’arrêt d’urgence provoque la coupure de l’alimentation en air, ils agiront différemment, car seul le premier reprendra sa position initiale. L’arrêt d’urgence a modifié l’état des sorties, ce qui influence l’évolution des étapes, car les capteurs détectent une situation anormale. Il y a donc interaction entre chacun des traitements d’un séquenceur.

Du grafcet au circuit logique à bascules J-K

La démonstration suivante décrit comment matérialiser un grafcet linéaire à l’aide de bascules J-K.

Traitement séquentielle

Le traitement séquentiel consiste à mettre en équation les conditions d’activation de chaque étape d’un grafcet. Ainsi, l’équation générale d’une étape comprend les quatre éléments suivants :

  • la mise à un par l’étape précédente ;
  • la réceptivité associée à la transition;
  • la mémorisation (maintien) de l’étape en cours;
  • la remise à zéro par l’étape qui suit.

Remarquez que les deux premiers éléments correspondent à la règle 2, qui évoque le franchissement d’une transition. Le dernier élément découle plutôt de la règle 3, qui énonce l’évolution des étapes actives. Enfin, la mémorisation de l’étape en cours vient de la nécessité de maintenir l’activation de l’étape, même après le franchissement de la transition. On n’a qu’à penser au signal fugitif d’une transition dont la réceptivité devient vraie uniquement au passage d’un front montant. Que vous matérialisiez le grafcet à l’aide de relais, de composants électroniques, d’un automate ou d’un relais programmable, ces quatre éléments sont toujours présents.

Dans l’exemple qui suit, la matérialisation de la séquence est effectuée à l’aide de bascules J-K. Comme une bascule a la capacité de mémoriser un état logique, la mise en équation se résume à établir les conditions de mise à un et de remise à zéro de chaque étape.

On s’aperçoit que chaque étape équivaut à une bascule. Le circuit électronique d’un séquenceur contient donc autant de bascules J-K qu’il y a d’étapes. Par ailleurs, on raccorde les bascules de manière synchrone en reliant toutes les entrées d’horloge à un signal commun qui oscille entre 10 Hz et 1 kHz, ce qui correspond à un temps de réaction du système entre 1 et 100 ms.

En analysant cet exemple, on remarque que l’activation d’une étape dépend de l’étape qui précède et de l’étape qui suit. Ainsi, l’activation de l’étape 3 relève de l’étape 2 et de l’étape 4. De ce fait, un grafcet linéaire contient habituellement au moins trois étapes.

Toutefois, il est possible d’obtenir un grafcet de deux étapes si on donne la priorité au RST de la bascule du relais programmable. Dans le cas d’un automate programmable, il suffit de placer le contact de désactivation sur la ligne de maintien.

Si une séquence compte seulement deux étapes, on ajoute une étape de synchronisation sans lui associer d’action. De plus, la réceptivité de la transition demeure toujours vraie (= 1).

Traitement postérieur

Le traitement postérieur consiste à associer une ou plusieurs actions aux étapes actives du grafcet. Une action peut être continue pendant toute la durée de l’étape (action inconditionnelle) ou encore dépendre d’un événement externe (action conditionnelle ou temporisée).

Lorsqu’une action est temporisée, on construit généralement le grafcet de façon que la réceptivité de la transition qui suit contienne la temporisation désirée. La syntaxe de la réceptivité d’une transition est la suivante :

Par ailleurs, l’activation des sorties dépend de la sorte de préactionneurs qui alimentent les dispositifs de puissance. Il existe des préactionneurs monostables et d’autres, bistables.

Les préactionneurs monostables regroupent habituellement les dispositifs à rappel-ressort comme les électrodistributeurs, les relais et les contacteurs. On considère aussi une lampe ou une DEL comme des sorties monostables, car elles s’éteignent lorsqu’on leur retire le signal de commande. En pratique, les sorties du genre monostable doivent être actionnées à chaque étape où l’action est nécessaire. Dans la figure ci-contre, c’est le cas de la lampe témoin PRÊT et du moteur électrique commandé par le contacteur M.

Les préactionneurs bistables regroupent habituellement les dispositifs à double pilotage. Comme ils ne contiennent aucun ressort de rappel, ces dispositifs ont la capacité de mémoriser l’information reçue pendant plusieurs étapes. Sur la figure ci-contre, le vérin A reçoit, à l’étape 2, la commande A+ pour effectuer la sortie de la tige. Le vérin A reste en position sortie pendant toute la durée des étapes 2, 3 et 4 avant de recevoir, à l’étape 5, la commande contraire A- pour rentrer la tige.

Traitement préliminaire

Le traitement préliminaire porte sur les procédures spéciales à suivre lors de la mise en marche et de l’arrêt d’un automatisme. Parce que chaque système doit être considéré comme un cas particulier, on se contentera pour l’instant d’analyser la situation la plus simple.

On sait que l’étape initiale d’un grafcet constitue la position de départ. Il faut alors que le système soit en mesure de réaliser cette situation initiale dès qu’on applique l’alimentation au circuit. Avec les bascules, il suffit de raccorder les entrées preset et clear de manière à forcer simultanément la mise à un de l’étape initiale et la remise à zéro de toutes les autres étapes.